Jean-Pierre Cordier, est un architecte pionnier de la conception bioclimatique dans les années 70. Il est aujourd’hui à la retraite, mais assure la formation continue d’une vingtaine d’architectes de la région toulousaine chaque année.
T’E : Quelles sont les principes de la conception bioclimatique ? c J-P C. : « “Il s’agit de construire un bâtiment qui règle les problèmes de confort interne. C’est-à-dire, qu’il y fasse spontanément le moins froid possible l’hiver et moins chaud l’été. Récemment, on a également ajouté d’autres exigences : la santé et l’impact écologique des matériaux. Il y a plusieurs règles de base :
opter pour un bâtiment compacte : c’est moins cher à chauffer mais aussi à construire et en matériaux.
Ensuite viens l’orientation des vitrages : la même recette est valable dans tout l’hémisphère nord. Les vitrages doivent se trouver au sud, pour avoir du soleil toute la journée l’hiver. L’été, le soleil y passe très haut, il ne dérange pas. Il faut bannir les ouvertures à l’est et à l’ouest, rès pénibles l’été.
Le bâtiment doit avoir une bonne inertie thermique : c’est-à-dire, des murs et des planchers épais, qui emmagasinent la chaleur la journée et la restituent la nuit et inversement avec la fraîcheur l’été. Ces règles de base ne coûtent rien à mettre en oeuvre et sont très économes. Les gens doivent donc d’abord réfléchir à la conception avant de pallier ses faiblesses avec des équipements techniques très coûteux. Faire appel à un architecte est là aussi un investissement rentable au long terme.” »
T’E : Comment s’est peu à peu imposée la conception bioclimatique ?
J-P C. : « Après le premier choc pétrolier, on a commencé à réfléchir à la question énergétique, mais on ne se posait la question que pour ne pas avoir froid l’hiver. Ensuite avec les centrales nucléaires et le chauffage électrique on a laissé tombé tout ça . La conception bioclimatique est reparue dans les années 2000, avec la prise de conscience écologique due à la canicule. La conception bioclimatique peut et doit gagner tous les bâtiments. Le plus urgent en terme énergétique est de corriger l’existant, mais on ne peut y améliorer l’isolation. Plus généralement, c’est l’urbanisme qu’il faut revoir. Etudier les relations entre les bâtiments, le bruit, les transports et surtout réfléchir à la mixité des quartiers (habitation, commerces et bureaux). »
T’E : Quels sont les pires bâtiments à vos yeux ?
J-P C. : « La toulousaine traditionnelle est plutôt bien conçue. Mais la terre cuite est fortement consommatrice d’énergie à sa fabrication et les briquetteries ont détruit des collines entières. Puis il a fallu beaucoup de gravas pour le béton du Mirail, ce qui a créé de nombreux étangs autour de Toulouse. Les pires habitations sont celles construites durant les trente glorieuses, avec beaucoup de vitrages et des formes délibérément complexes etc. Aujourd’hui c’est l’étalement urbain qui est effrayant. La maison individuelle est la pire des solutions lorsque l’on tient compte ds déplacements de toute la famille du réseau routier électrique etc. »